Pas de "titularisation massive" des contractuels de la fonction publique. Les propos tenus ces derniers mois par le secrétaire d'Etat à la Fonction publique, Georges Tron, étaient sans ambiguïté : si le gouvernement souhaite limiter les recours abusifs aux contrats et "améliorer les conditions d'emploi des agents non titulaires", il n'a jamais été question d'un plan de titularisation. Les propositions qu’il a fait parvenir aux organisations syndicales dans les tout derniers jours de 2010 confirment ce choix (voir le document que Localtis s'est procuré en téléchargement ci-contre). Si des "concours spécifiques professionnalisés" devraient bien être ouverts dans les trois prochaines années, ce sera au seul profit des agents non titulaires en CDI occupant un emploi permanent. Il s'agit des CDI de droit public, qui représentent une minorité des contractuels de la fonction publique. Avec de telles modalités, les agents passant du contrat au statut de fonctionnaire devraient être très peu nombreux. Ce qui déçoit fortement les syndicats, qui demandaient une titularisation de plus grande ampleur, selon des modalités négociées avec eux. A la CFDT, où l’on se dit "inquiet", on réclame par exemple des "mesures pérennes" d’accès aux emplois titulaires afin d'"empêcher la reconstitution d’un grand nombre d’agents non titulaires".
En revanche, la proposition de transformer en CDI les CDD des agents occupant un emploi permanent depuis au moins six ans – sur une période de référence de huit ans – est un peu mieux accueillie. Pour bénéficier d’une transformation de son contrat en CDI, l’agent doit aujourd’hui avoir occupé exactement le même emploi pendant six ans et de manière continue. Par conséquent, beaucoup d’agents, qui ont exercé des fonctions différentes au cours de plusieurs CDD, ou dont les contrats ne se suivaient pas, se voient refuser l’obtention du CDI. Les employeurs connaissent bien ces règles. C’est une des limites de ces CDI de droit public que dénonçaient déjà en juillet 2008, dans un rapport pour la commission des lois, les députés Bernard Derosier et Bertrand Pancher. Le gouvernement cherche donc à trouver une solution à ce problème en clarifiant les règles actuelles. De la part du gouvernement, "cela montre la volonté d‘avancer", relève la CGT. Restant sur sa faim, la CFDT demande de son côté que "dans des cas spécifiques" le CDI soit accordé au bout d’une période de trois ans, au lieu de six.
Des contrats plus longs et peut-être sur "projet"
Bien au-delà de la clarification des règles d’obtention du CDI, le gouvernement veut "moderniser" les cas de recours au contrat dans la fonction publique. Principal chantier : "identifier clairement les situations dans lesquelles il peut être recouru à un agent non titulaire" pour éviter des "pratiques abusives". "Besoin occasionnel" et "besoin saisonnier" devraient donc être définis beaucoup plus précisément qu'actuellement. Paradoxalement, cette clarification devrait aboutir à des contrats plus longs pour répondre aux besoins temporaires : en cas "d'accroissement temporaire ou saisonnier de l'activité", "la durée maximale des contrats sera de 6 mois renouvelables une fois dans la limite totale de 12 mois" (voir document de travail, p.6).
Simultanément, pour faire face à des "besoins permanents", le gouvernement propose d’étendre aux agents des catégories B et C les contrats de trois ans renouvelables une fois, actuellement réservés à la catégorie A. Prenant acte du nombre important d’agents non titulaires des catégories B et C, le gouvernement souhaite ainsi lutter contre la multiplication des contrats courts visant en fait à répondre à des besoins permanents. Si la CGT est favorable à une régularisation des situations présentes, elle s’insurge contre ce qui, en cas de pérennisation de la mesure, pourrait constituer "une nouvelle voie d’accès à la fonction publique", et remettrait en cause le concours. Autre idée dans les cartons du gouvernement : la création d’un nouveau type de contrat, dit "de projet". Défini par son objet et non sa durée, sur le modèle des "contrats de projet à terme incertain" du privé, ce nouveau mode de recrutement soulève l’opposition de l’ensemble des syndicats.
Clarifier les rémunérations
Les mesures visant à renforcer les garanties d’emploi et les droits des agents non titulaires devraient être mieux accueillies. Il s’agit de "formaliser" les procédures de recrutement, de clarifier les règles de renouvellement et de fin de contrat. Par ailleurs, les droits de ces personnels en matière de formation et de mobilité devraient être mieux reconnus.
En ce qui concerne les salaires, le gouvernement veut "clarifier la détermination des composantes de la rémunération des non-titulaires" pour lutter contre les fortes disparités salariales existant actuellement. Il est proposé à ce titre de "mieux prendre en compte à l’avenir les fonctions exercées et la performance [des agents]". Plusieurs syndicats réclament, de leur côté, la création de grilles salariales pour les non-titulaires.
La négociation entre le gouvernement et les représentants des employeurs et des organisations syndicales débutera le 11 janvier prochain. Elle se déroulera jusqu’en février, avec pour objectif de déposer un projet de loi sur le bureau de l'Assemblée nationale d’ici fin juin.
Les employeurs locaux sont sceptiques
Les pistes présentées par le gouvernement "tendent à faire du CDI un élément pérenne à côté du statut", a réagi Bernard Derosier, président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT). Le collège des employeurs territoriaux, réuni le 24 novembre dernier, s’est "inquiété" des "risques de voir créer un statut parallèle", a rappelé le président du conseil général du Nord qui, le 5 janvier, adressait ses voeux aux partenaires du CSFPT. Plutôt qu’un "système que personne ne réclame", les élus préféreraient une amélioration des recrutements sur concours et un renforcement du statut, a-t-il assuré.
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