"Les défis dans la fonction publique territoriale n’ont sans doute jamais été aussi grands." Lorsqu’elle évoque ce dossier qui lui tient particulièrement à cœur, la secrétaire générale de l’Association des maires de France se fait volontiers grave. Au-delà des difficultés de recrutement – "qui touchent aussi bien les communes urbaines que rurales" et affectent singulièrement "un nombre croissant de métiers en tension" –, Murielle Fabre pointe "le délitement du lien social", favorisé par la crise sanitaire, et la nécessité "de redonner du sens", mantra qui aura scandé tout le congrès (voir notre article du 22 novembre).
La casquette de maire-employeur désormais bien vissée
Ces défis, les maires sont plus que jamais prêts à les relever, assure-t-elle. Si la maire de Lampertheim (67) concède que la pandémie n’a pas toujours permis aux nouveaux maires de visser d’emblée "leur casquette d’employeur", elle observe que la crise a dans le même temps mis particulièrement en valeur "l’importance des agents publics et de l’enjeu des ressources humaines". "L’aspect maire-employeur est désormais évident pour les élus. C’est nouveau par rapport à ce que j’ai connu auparavant", reconnaît François Deluga, trésorier général de l’AMF et par ailleurs président du CNFPT.
Ne pas nuire
Plus que conscients des enjeux, "les maires ont envie de faire", souligne précise Murielle Fabre. Elle en veut pour preuve l’accord, qu'elle qualifie d’"extrêmement précurseur", sur la protection sociale complémentaire signé cet été (voir notre article du 11 juillet). "Les employeurs territoriaux agissent ! Mais on a besoin que le gouvernement nous aide." Cette aide prend différentes formes, dont l’une n’est pas sans évoquer le principe de "ne pas nuire" (do not harm) en vogue à Bruxelles. Tel est pourtant le cas "lorsque l’État transpose à la FPT des dispositions qui ne sont pas adaptées, sans associer les employeurs locaux, comme on l’a vécu avec les primes Ségur" (voir notre article du 6 janvier 2022), relève Murielle Fabre. Tel est également le cas lorsque le gouvernement "décide, de manière abrupte de revaloriser en juillet le point d’indice alors que nos budgets sont bouclés" (voir notre article du 13 juin), note-t-elle encore.
Besoin de visibilité
"Nous avons besoin de visibilité", insiste l’élue. Pour l’heure, elle semble faire défaut. "En janvier, Stanislas Guerini nous indiquait qu’il n’y aurait pas de projet de loi. En octobre [septembre – voir notre article du 1er septembre], on apprend dans la presse qu’il y en aura bien un", observe François Deluga, qui par ailleurs n’a toujours pas digéré "d’apprendre dans un tweet" du ministre de l’Intérieur la volonté de créer une école nationale pour la police municipale (voir notre article du 27 octobre), à laquelle il reste fermement opposé. "Stanislas Guerini aurait également été surpris par cette annonce", indique Murielle Fabre, qui dénonce une tendance "à travailler en silos dans les ministères" d’autant plus préjudiciable que "les RH doivent être une politique transversale". Dans la même veine, l’AMF déplore le "désengagement de l’État" de l’apprentissage et l’invite à revenir dessus, "en respectant l’accord financier de 2021" (voir notre article du 15 octobre 2021).
Réforme attendue
Déplorant par ailleurs que "presque rien n’a changé" depuis le précédent congrès des maires (voir notre article du 24 novembre 2022), Murielle Fabre souligne que "la réforme souhaitée par Stanislas Guerini [voir notre article du 2 novembre] est extrêmement attendue. Il faut agir rapidement !". Elle l’assure, l’AMF y prendra "une part active", même si elle n’entend pas se faire dicter sa conduite : "Nous n’avons pas souhaité répondre à la to do list, proposition par proposition comme dans un tableur Excel, communiquée par le cabinet du ministre. Nous avons adressé une proposition globale, complète, pour aller dans le détail sur les trois dimensions proposées : accueil, parcours et rémunération (APR)." "On a beaucoup travaillé sur APR. On attend désormais le calendrier. Hier, Stanislas Guerini s’est engagé à nous associer et à prendre en compte nos propositions", veut croire François Deluga. Si l’AMF se dit "consciente que la crise de l’attractivité dépasse la stricte question de la rémunération" - demandant notamment plus de marges de marge pour que le maire-employeur puisse développer sa politique RH -, François Deluga juge "évident qu’une part de l’attractivité tient à la rémunération". "C’est le principal enjeu", complète Murielle Fabre.
Indispensables moyens financiers
Sans surprise, tous deux insistent pour que l’aide de l’État prenne également la forme de moyens financiers. "Nous souhaitons que la revalorisation porte sur l’indiciaire. Mais il faut une recette en face !", déclare François Deluga. En prenant bien soin d’insister sur le fait que "le débat sur la décorrélation du point d’indice entre les trois versants est clos. Les employeurs et les organisations syndicales y sont opposés. Le ministre nous a dit que la question ne se posait plus. Dans le cas contraire, ce serait un casus belli absolu". "Nous sommes favorables à une véritable refonte du régime indemnitaire. L’augmentation des primes a été une réponse apportée par les collectivités à l’absence de revalorisation de l’indice, mais ce n’est pas une solution de long terme. Comme l’a montré le baromètre HoRHizons [voir notre article du 3 octobre], nous sommes tous d’accord pour augmenter les rémunérations, mais nous ne sommes pas en capacité de le faire", lui fait écho Murielle Fabre. Qui prend encore l’exemple des secrétaires de mairie : "Tout le monde est d’accord pour les revaloriser, mais avec quels moyens ?" Pour l’heure, la question reste entière.
Le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) et la Fédération nationale des centres de gestion (FNCDG) ont reconduit leur partenariat pour la période 2023-2026, en signant un nouvel accord-cadre ce 22 novembre, sur le Salon des maires (le premier l’avait été en 2019 – voir notre article du 20 novembre 2019). Quatre axes prioritaires de coopération y sont arrêtés : la connaissance, la promotion et l’attractivité de l’emploi public local ; l’affirmation d’une approche complémentaire et dynamique des conditions et procédures de recrutement ; l’ambition de proposer des parcours professionnels adaptés aux aspirations contemporaines des agents, en cohérence avec les besoins émergents des politiques publiques locales ; une entente au service de la reconnaissance et de l’affirmation d’une République décentralisée (voir le communiqué pour de plus amples précisions). |
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