Comme chaque année, la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) publie sa synthèse des rapports d'activité des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH). La présente livraison porte sur les rapports relatifs à l'année 2011. Le principal enseignement réside dans le fait que l'activité des MDPH "semble ralentir". L'expression doit toutefois être interprétée de façon littérale. En effet, le nombre de demandes adressées aux MDPH a progressé de 6,4% en 2011. Mais cette hausse significative doit être rapprochée de celle de 2010, qui était encore de 15,2%. En outre, 23,2% des MDPH répondantes ont constaté non pas une hausse, mais une baisse. Au total, le nombre moyen de demandes déposées en 2011 est de 53 demandes pour 1.000 habitants (+5 points par rapport à l'année précédente), mais avec des écarts importants selon les départements (de 31 à 79 demandes). Par ailleurs, les adultes déposent en moyenne 2,4 demandes et 2 demandes pour les enfants.
Des délais qui s'améliorent
La synthèse réalisée par la CNSA montre également que l'année 2011 a connu peu d'évolutions dans la répartition des demandes concernant les adultes et les enfants handicapés. Les demandes pour les adultes concernent ainsi la carte d'invalidité et de priorité (24% du total), l'allocation aux adultes handicapés (16%), la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé ou RTQH (16%), la carte de stationnement (14%) et l'orientation et formation professionnelles (10%). S'y ajoute un poste "Autres" de 19%, regroupant notamment l'orientation en établissements et services médicosociaux (7%), le complément de ressources (6%) et la prestation de compensation du handicap ou PCH (4%). Le rapport relève au passage "le poids important de l'activité liée aux personnes âgées de plus de 60 ans". Celles-ci représentent en effet 40% des demandes de carte de stationnement et 31% des demandes de cartes d'invalidité et de priorité. Pour les enfants, les principales demandes portent sur l'orientation en établissements et services médicosociaux y compris scolaires (29%), l'allocation d'éducation pour enfant handicapé (AEEH) y compris les compléments (28%), les auxiliaires de vie scolaire (12%) et les avis de transports scolaires (12%).
En termes de procédures, on retiendra notamment que 81% des évaluations se font sur dossier, contre seulement 9% réalisées à la MDPH et 7% sur le lieu de vie (domicile ou établissement). De même, un tableau met en évidence les écarts dans les taux d'accord sur les demandes de prestations. Chez les adultes, ces décisions positives vont ainsi de 20% pour le complément de ressources à 70% pour l'AAH et plus de 90% pour l'allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP), l'orientation en établissement, l'orientation professionnelle et la RTQH. Les écarts sont moins importants pour les enfants. Le plus faible taux d'accord concerne la PCH enfants, mais atteint néanmoins près de 60%. Il frise en revanche les 100% pour le maintien en établissement au titre de l'amendement Creton et dépasse 90% pour les différentes orientations (scolaire, en établissement et en service). Autre point positif - et chiffré - : l'amélioration des délais de traitement, que l'on peut supposer être liés à la moindre pression sur les demandes. En 2011, 60% des MDPH enregistrent ainsi une baisse de leurs délais moyens de traitement.
Sur le fonctionnement, et les moyens des MDPH, l'étude de la CNSA met en évidence "un budget en tension et des effectifs qui se stabilisent". Les dépenses des MDPH ont progressé en 2011 de 7%, pour atteindre un total de 316 millions d'euros, contre 5% et 315 millions d'euros pour les recettes. Ces dernières sont assurées à 41% par les départements, à 35% par l'Etat et à 19% par la CNSA. A partir des éléments budgétaires, la synthèse évalue à 225 euros le coût moyen de traitement d'un dossier.
La convergence personnes âgées/personnes handicapées se poursuit
Pour leur part, les effectifs totaux comptabilisés en 2011 s'élèvent à 5.378 ETP, soit 4.942 ETPT (équivalents temps plein travaillé), soit une hausse de 7% par rapport à 2010 (ce qui correspond à une définition extensive de la stabilisation). Les MDPH disposent en moyenne de 54 ETP (49 ETPT). Les départements sont le principal employeur (49% des effectifs), suivis des MDPH elles-mêmes (29%) et de l'Etat (19%). Ces personnels sont affectés à l'instruction (38% des effectifs), à l'évaluation (34%), à l'administration générale (16%) et à l'accueil (12%). La disparité des statuts reste la règle, avec 58% de fonctionnaires, 17% de CCD de droit public, 11% de CDI de droit public, 10% de CDI de droit privé, 2% de vacataires, 1% de CDD de droit privé et 1% de contrats aidés...
Tout aussi intéressante, la deuxième partie de l'étude est consacrée à une série de focus sur des thèmes relatifs au fonctionnement des MDPH et aux différentes prestations instruites. On y trouve ainsi des développements sur la scolarisation des enfants, la PCH, "le pilotage des MDPH au service de la qualité de service", leur gouvernance ou encore l'animation du réseau des MDPH par la CNSA.
Au final, l'étude relève "des résultats très encourageants en termes de délais et de traitement des dossiers" et considère que "même si la progression de l'activité semble se ralentir, la pression et les attentes à l'égard des MDPH restent fortes". La CNSA observe également "la confirmation du mouvement vers la convergence des politiques personnes âgées et personnes handicapées : schémas de l'autonomie, mutualisation des équipes (de l'accueil à l'évaluation) voire organisation totalement mutualisée sous forme de maison de l'autonomie".
Jean-Noël Escudié / PCA
Le statut des MDPH toujours en suspens ?
Ce vaste baromètre de l'activité des MDPH paraît au moment où un certain flou plane sur leur devenir, ou du moins sur le devenir de leur statut. Les premières versions de travail du futur projet de décentralisation dessinaient en effet une "départementalisation" complète des MDPH : il était prévu que celles-ci abandonnent leur statut de GIP pour devenir un "service non personnalisé du département". Les documents qui ont circulé prenaient soin de souligner que "la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées conservera l’ensemble des attributions (prestations, reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé) qui lui ont été conférées par la loi de 2005." La précision n'a pas empêché les principales associations de personnes handicapées de monter très vite au créneau contre cette disposition qui aurait selon elles entraîné "de grandes disparités de traitement entre les départements", pour reprendre les mots de l'Association des paralysés de France (APF). La mobilisation a visiblement porté ses fruits… puisque les MDPH ont disparu de la dernière version en date (la "V6") de l'avant-projet de loi porté par Marylise Lebranchu. Pour l'heure, le volet "handicap" de la réforme de la décentralisation se résume donc au transfert aux départements des établissements et services d'aide par le travail (Esat). Les associations, à l'instar de l'Unapei (Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis), se félicitent de cette marche arrière, mais disent attendre "que le gouvernement confirme l'abandon total et définitif d'un tel transfert qui remettait en cause le principe de participation et d'égalité des personnes handicapées" et "que la CNSA voit son rôle renforcé dans le pilotage des MDPH." Si cet abandon devait être confirmé dans le texte qui sera présenté en Conseil des ministres fin mars ou début avril, il n'est pas exclu que le sujet ressurgisse lors des débats parlementaires, notamment au Sénat, sachant que le statut des MDPH a régulièrement été mis en question, notamment par les départements eux-mêmes. Il l'a été dans plusieurs rapports. Et il l'a été en 2011 dans le cadre de l'examen de la proposition de loi Blanc "tendant à améliorer le fonctionnement" des MDPH, qui allait devenir la loi du 21 juillet 2011. En sachant que ce texte, déjà, avait fait le choix de "consolider" le statut de GIP. Car apparemment, aucune autre formule ne parvient à satisfaire toute le monde. Le GIP pourrait donc bien, une fois de plus, par défaut, s'imposer comme étant le statut le moins mauvais possible…
C.M.
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